La vallée des roses et des rois Thraces

La plaine au nord du massif du grand Balkan est plate comme la main. Entre les villes de Chipka (Шипка) et de Kazanalak ( Каэанлък) on trouve principalement deux choses : des champs de roses et des tombeaux thraces. Ces derniers sont les seuls reliefs de la plaine.

La rose est cultivée depuis toujours dans la région. Des textes grecs vantaient déjà la qualité des roses cultivées ici. Dès l’indépendance, de grandes maisons exportent l’eau de rose et l’huile de rose dans le monde entier. Toutes ces entreprises sont nationalisées pendant la période communiste, et privatisées après, mais la production et l’exportation n’ont jamais cessé. Aujourd’hui toutes les boutiques du pays vendent parfums, savons et cosmétiques à la rose.
Les variétés produites en Bulgarie sont essentiellement les roses de Damas et Alba, alors qu’à Grasse ont cultive la rose Centifolia. Chaque variété a ses subtilités qui font le miel  des parfumeurs.
Le festival de la rose de Kazanlak a lieu chaque année en mai. Et c’est à Kazanlak que se trouve le musée de la rose.

Le musée de la rose de Kazanlak

Le musée raconte les siècles de culture de la rose en Bulgarie en quelques salles. On en fait vite le tour. Je me demande s’il ne sert pas de prétexte à la boutique.

Mais avant d’arriver à Kazanlak, et entre deux visites au Bouzloudja, je me suis d’abord intéressé aux tombeaux thraces.

En descendant de la montagne, on remarque tout de suite plusieurs tumuli.

Des tumuli dans la région de Chipka

Il y a un belle concentration de tumuli autour de Chipka. Ils datent du IVème siècle avant JC environ et appartiennent à la culture thrace. Des tombeaux thraces ont également été découverts dans d’autres régions de Bulgarie.
Les Thraces sont un ensemble de peuples dont l’aire géographique correspond à peu près à la Bulgarie actuelle. D’après la tradtion Dyonisos et Orphée étaient Thraces. Mais le Thrace le plus connu reste Spartacus.
La civilisation thrace s’est dévelopée à partir du deuxième millénaire, ce qui en fait des contemporains des Achéens (Mycènes), des Ioniens ou des Eoliens, des peuples grecs avec lesquels les Thraces partagent des traits culturels et religieux.
Les Thraces sont réputés pour leur orfèvrerie en or dont j’ai pu voir quelques exemples au musée archéologique de Sofia, et lors d’une importante exposition au Louvre il y a quelques années.
En 133 av JC les Thraces passent sous domination romaine. Une province de Thrace romaine est même créée en 46.

Souvent les peuples modernes se cherchent un peuple antique comme ancêtre. Pour les Bulgares, leurs ancêtres sont tout trouvés : ce sont les Thraces !

Rien qu’autour de Chipka, sept tumuli sont ouverts à la visite. Je n’en ai visité que deux plus un troisième à Kazanlak.

Le tombeau du rois Seuthès III, découvert en 2004, est le plus connu. C’est le seul dont on connaît avec certitude le nom du pensionnaire.

La tombe de Seuthès III

Seuthès III était un contemporain d’Alexandre le Grand. Sa capitale, Seuthopolis, à été découverte et fouillée en 1948, puis engloutie dans un lac de barrage.

On ne sait pas qui a été enseveli dans le tombeau Ostrusha, qui a été pillé pendant l’antiquité. Il comportait 6 pièces, dont une seule a été reconstituée dans un petit édicule à part.

Détail du plafond du tombeau d'Ostrusha

Le ciel du tombeau est décoré de peintures très fines, mais malheureusement très dégradées.

Enfin, dans un parc de Kazanlak, un autre tombeau a été découvert en 1944 par des soldats qui creusaient des tranchées.

La voûte du tombeau thrace de Kazanlak

Ce tombeau est spectaculaire par ses fresques découvertes en très bon état et il fait partie du Patrimoine Mondial de l’Unesco depuis 1979. Ce qu’on visite est en fait une réplique à deux pas du tombeau original qui est fermé à la visite pour préserver ses fresques.

Cette concentration de tombeaux antiques est intéressante, mais je suis un peu déçu.
Chaque tombeau est très petit (2 mètres de diamètre pour celui de Kazanlak) et la visite est vite terminée. A 6 leva (3 €) par visite la note monte vite. Et tous les objets découverts (130 pièces pour 1 kg d’or au total pour celui de Seuthès III) ont été mis à l’abris dans des musées ou des réserves.

Finalement j’ai fini ma journée et je suis arrivé à l’hôtel à Kazanlak vers 16h. La ville en elle-même ne présente pas un grand intérêt, et j’aurais peut-être pu aller dormir plus loin sur mon parcours.
Mais l’hôtel a une belle terrasse ombragée et ventilée, et je m’y suis installé pendant deux bonnes heures avant de quérir quelque nourriture

Le soir j’ai mangé un Kudkudicania (enfin je crois).

C’est du porc dans une sauce épaisse pleine de champignons, d’oignons et d’abricots sec et c’est très bon.
A midi, j’avais pris un petit encas souvent proposé en apéritif : une assiette de coeurs de volaille aux oignons. Et c’était bon aussi.

J’ai mangé presque à chaque repas en terrasse, et presque à chaque fois aussi il y a des chats qui patrouillent autour des tables, et ils savent s’y prendre pour obtenir leur part. A mon avis ils ne mangent pas souvent des croquettes.

Demain : direction Polvdiv.

Bouzloudja

Le mont Bouzloudja (Ъуэлуджа) qui culmine à 1430 mètres d’altitude est situé à une dizaine de kilomètres à l’est du col de Chipka. Plusieurs événements historiques s’y sont produits.
En 1868, dix ans avant la guerre d’indépendance, une petite troupe de Bulgares en révolte y a été anéantie par l’armée ottomane.
En 1877-78 des combats s’y sont déroulés dans le cadre des batailles de Chipka.
En 1891, le premier congrès socialiste bulgare s’y est tenu dans la clandestinité.
Dans le courant des années 1970 le parti communiste bulgare, lointain descendant du congrès de 1891, décide de construire sur cette montagne au passé glorieux une Maison du Peuple.

La maisn du peuple du mont Bouzloudja

Le monument sera inauguré après des années de travaux en 1981 et servira pour des cérémonies officielles comme des remises de décoration ou des congrès du parti. Une résidence pour les congressiste sera construite dans la forêt à quelques kilomètres de là. Cette résidence est devenue un hôtel, dans lequel j’ai passé la nuit afin d’être au plus près du monument.

Le monument ressemble à une soucoupe volante de 60 mètres de diamètre et 22 de haut. Sa grande salle est assez vaste pour accueillir des milliers de personnes. Sa forme futuriste de soucoupe volante était dans l’air du temps, mais elle était aussi conçue pour résister aux rudes conditions climatiques (-25°C et vents violents) qui prévalent à cette altitude en hiver. Le bâtiment est couvert d’un dôme métallique de 640 tonnes.

La soucoupe est flanquée d’un pylône de 70 mètres de haut. Il est orné de deux étoiles rouges en verre. Chacune mesure 6 mètres de large sur 12 de haut. A l’époque elles pesaient 3,5 tonnes et étaient éclairées.

Bouzloudja

Respectivement 8 430 et 3 720 m3 de béton ont été coulés pour la soucoupe et le pylône.
Le chantier a nécessité d’araser la montagne et de construire des routes pour transporter les matériaux : 70 000 tonnes de béton, 3 000 d’acier et 40 de verre.
6 000 ouvriers, dont 500 soldats du génie et des bénévoles ont été mobilisés pendant des années.
La décoration intérieure, faite de fresques et de mosaïque a pris 18 mois à des dizaines d’artistes.

L’architecte, Georgi Stoilov, a conçu de nombreux bâtiments et monuments, dont l’arche de la liberté que j’ai vue lundi dernier.

Le monument a été inauguré en grande pompe en 1981, et abandonné en 1989 avec la chute des régimes communistes d’Europe de l’est.

Le nouveau gouvernement refusa d’entretenir ce bâtiment encombrant et le laissa ouvert aux quatre vents. Il est rapidement pillé, notamment la toiture métallique et les étoiles que la rumeur disait être faite de rubis.
Privé de toiture, le bâtiment se dégrade rapidement.

On voit à travers le toit.

Pendant des années, c’était le paradis des amateurs de lieux abandonnés et interdits. Des dizaines de vidéo d’explorations du monument existent sur internet.

Aujourd’hui le bâtiment est fermé et gardienné : il est impossible d’y pénétrer, mais on peut toujours en faire le tour et profiter du paysage. Ce que j’ai fait hier soir et ce matin, pour profiter de différentes lumières.

Bouzloudja

Je suis monté quatre fois au sommet. D’abord hier soir vers 16h, mais il pleuvait, donc je ne me suis pas attardé et suis allé à l’hôtel. J’y suis retourné vers 18h sous le soleil presque couchant. Puis ce matin en partant de l’hôtel. Il y avait du soleil mais le ciel était gris, donc j’y suis retourné une dernière fois vers midi pour profiter du soleil et du ciel bleu.
Je suis fasciné par ce monument et ce qu’il représente : une débauche de moyens dans un but purement symbolique, au delà de la raison.
Visiblement je ne suis pas le seul qui éprouve de l’intérêt pour ce vestige du communisme : à chacune de mes visites il y avait du monde.

Je ne sais plus quand j’ai découvert l’existence de la Maison du Peuple du mont Bouzoudja, mais depuis j’avais toujours rêvé de le voir en vrai. C’est chose faite et je suis bien content.

J’ai fait 137 photos du monument, quelques unes sont dans l’album.

Chipka

Le col de Chipka (шипка)  est un des passages à travers le Grand Balkan. Il a été le lieu de quatre batailles pendant la guerre russo-turque de 1877-1878. Pendant les premières phases de la guerre, l’armée russe, venant de Roumanie, a traversé le Danube et marchait vers le sud. Le col de Chipka, tenu par l’armée turque, bloquait l’avance russe vers la plaine bulgare. La première bataille de Chipka est la capture du col par l’armée russe. Les trois batailles suivantes sont des tentatives infructueuses de reprise du col par l’armée turque. les trois assauts ont été repoussés, grâce à la résistance acharnée des volontaires bulgares qui combattaient avec l’armée russe, qui comptait aussi des régiments finlandais dans ses rangs, soit dit en passant.

Les batailles du col de Chipka ont joué un rôle crucial dans la guerre, et une imposant monument commémoratif y a été inauguré en 1934.

Les 185 marches de Chipka

Wikipedia prétend qu’il est inspiré du monument de la bataille des Nations, à Leipzig, mais je suis moyennement convaincu. J’avais plus pensé à une tour bismarckienne au premier regard. A l’intérieur se trouve un petit musée sur les batailles de Chipka et du sommet on a une vue splendide sur les deux côtés du col.

La plaine vue depuis le monument de Chipka


Quand je suis arrivé, le sommet et la tour étaient dans les nuages. Heureusement ils se sont dissipés, mais j’ai dû patienter une demi-heure, adossé à un rocher à l’abri du vent.

Au pied du col, la petite ville de Chipka abrite le temple-mémorial de la naissance du Christ.

L'église mémorial de Chipka

Cette église orthodoxe, de style moscovite, a été inaugurée 25 après la bataille et a été dédiée aux soldats russes, ukrainiens et bulgares mort pour la libération de la Bulgarie. Leurs restes sont rassemblés dans des sarcophages dans la crypte de l’église. Ses cloches ont été fondues avec les cartouches récupérées sur le champ de bataille.

Depuis le sommet, entre les nuages, on peut distinguer une forme mystérieuse.

Mystère au loin

Le mystère sera éclairci demain.

Le soir j’ai mangé d’excellentes brochettes de veau selon la recette du coin, selon le serveur.

Donc apparemment les carrés de poivrons et d’oignons entre les cubes de viande viennent d’ici.

Le temps était très couvert et froid le matin : j’ai dû ressortir mon pantalon du fond de la valise. Dans l’après-midi il faisait beau et chaud au pied de la montagne, mais comme j’ai passé l’essentiel de la journée entre 1300 et 1400 mètres d’altitude, je n’ai pas souffert de la chaleur.

Comme toujours : plus de photos dans l’album.

Veliko Tarnovo

Veliko Tarnovo (Велико Търново), ou la Grande Tarnovo, était la capitale du Second Empire Bulgare. A cette époque le nom de la ville était Tarnovgrad.

Pour ceux qui dormaient pendant leur cour d’histoire de la Bulgarie à l’école, je rappelle que le Premier Empire Bulgare a duré de 681 à 1018, quand le pays passe sous l’autorité de Byzance, pendant le règne de Basile II, le Bulgaroctone (tueur de Bulgares, tout un programme).

Suite à une révolte menée par les frères Asen, les Bulgares s’affranchissent de Byzance et le Second Empire Bulgare est créé en 1186. Un monument a été élevé en 1985 à la gloire des frères Asen.

Le monument des frères Asen

Ce n’est pas le premier monument patriotique installé pendant la dernière décennie du régime communiste que je vois. Je ne sais pas s’il y en avait eu avant, la question mérite approfondissement.

La conquête turque mettra fin au Second Empire Bulgare en 1396. La Bulgarie ne sera restaurée en tant qu’état indépendant qu’en 1878.

Le prestigieux passé de Veliko Tarnovo est bien visible à travers son impressionnante forteresse qui domine la ville. Il y en a même deux, sur deux méandres de la rivière Yantra : Tsarevets (Тцаревец) et Trapezitsa (Трапеэица). Trarevets est la principale et c’est par elle que j’ai commencé ma journée.

Tsarevets a la forme d’un triangle dont deux côtés sont visibles depuis la ville. On accède à la forteresse par un des angles,  relié à la ville par un long éperon rocheux.

L'entrée de Tsarevets

Plus qu’une forteresse il faudrait plutôt parler de ville. Les archéologues y ont trouvé les traces de 400 bâtiments résidentiels, 22 églises et 4 monastères. Ça paraît fou qu’il y ait eu autant d’édifices, même de petites tailles, dans un espace si réduit. J’ai déjà remarqué, par exemple à Olympie ou à Mystras, que ce qui était grand pendant l’antiquité ou le moyen-âge ne le paraît pas autant aujourd’hui.

Au sommet de la colline trône le palais du patriarche, un palais au milieu du château, dont l’église cathédrale a été reconstruite en 1981. Elle est ornée de fresques modernes.

En face de Tsarevets, Trapezitsa est moins étendue, avec seulement 18 églises, et n’a quasiment plus de murailles. On y accède par un funiculaire. Je ne savais pas qu’il fermait à 16h30, et j’ai eu la chance d’emprunter le dernier aller-retour. Le principal intérêt de Trapezitsa (sauf pour les spécialistes des églises de forteresse) est qu’elle offre le meilleur point de vue sur Tsarevets en fin d’après-midi, c’est pour ça que je n’y suis pas allé tout de suite en sortant de Tsarevets.

Tsarevets

Entre temps j’étais allé à Arbanassi (Арбанаси), un petit village tranquille sur les hauteurs à quelques kilomètres de Veliko Tarnovo. Arbanassi est, paraît-il, une destination prisée des Bulgares pour passer un week-end ou organiser un mariage. C’est vrai que le nombre d’hôtels ou d’auberges est hors de proportion par rapport à la taille du village. Mais c’est mercredi aujourd’hui et il n’y avait pas grand monde.

La principale curiosité d’Arbanassi est l’église de la Nativité du Christ. De l’extérieur, elle ne paie pas de mine : un bâtiment  bas et longiligne (28m sur 10) sans clocher. C’est qu’elle a été construite au XVIème, pendant la domination ottomane. A cette époque le culte chrétien n’était pas interdit, mais il devait rester discret.

L’intérêt est à l’intérieur. Toutes les salles de l’église sont entièrement couvertes de fresques. Il n’y a pas une centimètre carré sans couleur.

L'église de la Nativité du Christ, Arbanassi

Comme il n’y a pas de fenêtres et que la voûte est basse, on a l’impression d’être dans une grotte ornée. Des milliers de personnages, saints et martyrs sont représentés avec finesse, réalisme et des couleurs éclatantes. Leurs noms sont inscrits, mais en écriture cyrillique ancienne, donc impossible à déchiffrer (j’ai déjà du mal avec le cyrillique moderne). Mais d’un bout à l’autre de l’Europe on reconnaît les mêmes figures : Saint-Georges est toujours sur son cheval à terrasser le dragon.

C’était magnifique.

A part Tsarevets et Trapezitsa,  ce que j’ai vu de la ville de Veliko Tarnovo n’est pas très agréable. Du fait du relief, il n’y a qu’une rue et la circulation est intense.

Je suis rentré à l’hôtel vers 17h, juste avant un énorme orage et des trombes d’eau qui ont duré deux bonnes heures. J’ai eu de la chance puisqu’il a fait plutôt beau toute la journée, même s’il y avait beaucoup de nuages, et j’ai pu faire le touriste sans être gêné par la pluie.

J’avais espéré durer un peu plus longtemps, mais ce soir j’ai craqué pour une pizza Прошуто крудо (prosciutto crudo). C’est bien de connaître les langues étrangères : on n’a pas besoin des photos sur le menu pour choisir.

L’autre curiosité de Veliko Tarnovo est son spectacle son et lumières. Pour les lumières, c’est Tsarevets qui sert de décor avec projecteurs de différentes couleurs et rayons laser. Quant au son, il faut acheter son ticket et prendre place dans un des fauteuils de la terrasse couverte. Les hauts-parleurs sont en cet endroit. Autrement dit on peu jouir du spectacle sans la musique gratuitement depuis la rue, mais on entend un peu le son quand même.

Veliko Tarnovo Light Show

Le spectacle n’est pas joué tous les soirs. Quand j’avais préparé mon voyage, seule une représentation était prévue ce soir. Mais une fois arrivé sur place, je me suis rendu compte qu’il est donné quasiment tous les soirs de cette semaine. Hier je l’ai vu avec le son et ce soir je me suis offert une deuxième séance sans le son.

C’est un beau spectacle. Peut-être pas au point de venir exprès mais si on est déjà sur place, ce serait dommage de ne pas en profiter.

Demain, le soleil devrait être pleinement de retour pour une journée au grand air, mais avec une touche historique.

De Lovetch à Veliko Tarnovo

Après une bonne nuit, j’étais à pied d’œuvre pour visiter Lovetch (Ловеч), au moins Varosha (Вароша), le quartier ancien.

Comme à Koprivchtitsa les ruelles sont étroites et tortueuses. J’ai dû m’y aventurer avec la voiture, mais ce n’était pas aussi ardu qu’à Sorrento.

Le monument le plus connu de la ville est son pont couvert, le seul de Bulgarie.

Le pont couvert de Lovetch

Plusieurs ponts se sont succédés à cet emplacement, tous ont été détruits par des incendies ou des crues. Le pont actuel date de 1931. Il est en béton mais on lui a redonné son aspect primitif en bois. Aujourd’hui le pont abrite l’office de tourisme et quelques boutiques.

La ville est dominée par la forteresse d’Hirsaya. Si le site était déjà occupé par les Romains, c’est l’une des dernières forteresses byzantines tombée aux mains des Ottomans en 1445. Ils l’ont démantelée et elle a servi de carrière pour les habitants de la ville,  donc il n’en reste pas grand’chose. Avec un peu d’imagination on peut deviner le tracé des sept petites  églises qui existaient dans l’enceinte.

Le château de Lovetch

Le héros local est Vasil Levski. A partir de 1876, il a organisé les comités locaux qui lanceront la révolte contre l’empire ottoman. Il sera arrêté et exécuté avant qu’elle ne commence. Un important musée lui est consacré dans la ville et sa statue domine la ville autant que le château.

Vasil Levski

Normalement j’aurais dû visiter les bains turcs, mais ils étaient fermés aujourd’hui.

Je suis parti de Lovetch vers 11h après une intéressante discussion avec Dimitar, le propriétaire du gîte, sur le passé, le présent et l’avenir de la Bulgarie.

Les curiosités suivantes aux programme sont naturelles : une grotte et une cascade.

Je ne sais pas si le terme de « grotte » convient à celle de Devetashtaka tant ses dimensions sont hors norme.

La grotte de Devetashka

C’est une énorme voûte naturelle, 58 mètres à son plus haut. Elle est percée de sept trous gigantesques à travers lesquels ont voit le ciel et les nuages. Elle sert de refuge à une colonie de chauves-souris, c’est pourquoi l’accès du fond de la grotte est interdit. Spectaculaire.

La, où plutôt les cascades de Kurusha (Куруша) sont atteintes après une petite marche en forêt, donc à l’ombre, ce qui est appréciable par cette chaleur.

La cascade de Krushuna

Un autre chemin, plus pentu, permet d’arriver au sommet de la cascade, ou plus précisément à la résurgence qui alimente la cascade. Je crois bien que c’est la première fois que je vois un ruisseau sortir ainsi d’une montagne. En tout cas c’est bien pratique pour se rafraîchir après une telle ascension.

Pour que la journée soit bien éclectique, j’ai poursuivi ma route vers l’est et vers l’antiquité romaine grâce au site de Nicopolis ad Istrum.

Nicopolis ad Istrum est une petite ville romaine fondée entre 101 et 106 après JC. Tout le site n’a pas été fouillé mais on peut voir déjà pas mal de bâtiments, donc l’odéon (un petit théâtre), et surtout de larges rues pavées de dalles de pierre de plus de deux mètres de long.

La voie vers Nicopolis ad Istrum

Détail intéressant, certaines parties du site sont en cours de dégagement, et on peut voir que la profondeur somme toute modestes des vestiges sous le niveau du sol.

Fouilles de Nicopolis ad Istrum

De nombreux panneaux (en bulgare et en anglais) permettent de se repérer. Un grand nombre de ces panneaux portent en fait la traduction de stèles originales (en grec, pas en latin), ce qui donne de la vie au site et va au delà de la simple description technique.

Stèle à Nicopolis ad Istrum

C’est toujours intéressant de visiter des sites romains à travers toute l’Europe.

De Nicpolis ad Nistrum je n’ai que 30 minutes pour arriver à l’étape du jour : Veliko Tarnovo, où je resterai deux nuits.

Voici la vue de ma chambre d’hôtel.

La vue de ma chambre

La journée de demain s’annonce bien.

Le soir j’ai tenté à nouveau un plat d’ageau, ce coup-ci accompagné de yaourt bulgare.

J’aurais bien aimé voir les papiers de l’agneau, et ils ne se sont pas forcés sur le yaourt.

Avec les baklavas au dessert, au moins, on n’est jamais déçu.

Il a fait beau toute la journée, mais le soir était un peu gris et quelques gouttes sont tombées. J’espère que le soleil sera de retour demain matin.

Comme toujours : n’oubliez pas l’album.

La traversée du Grand Balkan

Ce qu’on appelle « Les Balkans » est la région d’Europe dont fait partie la Bulgarie. Au sein de cette région, le Grand Balkan est une chaîne de montagnes qui traverse tout le pays d’est en ouest, de la Serbie à la mer Noire et je l’ai traversée aujourd’hui.

Je suis parti ce matin de l’aéroport  de Sofia où j’ai pris possession de ma voiture de locations.

Environ 1h30 de route plus tard je suis arrivé à Koprivchtitsa (Копривщица). Ce petit village situé à l’écart des grands axes a conservé ses vieilles maisons du début du XIXème siècle.

La maison de Todor Kableshkov à Koprivchtitsa

Koprivchtitsa est un dédale de ruelles pavées et de ruisseaux qu’enjambent des petits ponts de pierre. Les plus belles maisons (les mieux entretenues ?) sont peintes de couleurs vives. Elles sont souvent entourées de hauts murs et on y accède par un large portail en bois.

On dirait que le village est composé de dizaines de petites forteresses.

Koprivchtitsa

D’après les guides, Koprivchtitsa est un des villages les plus typiques de Bulgarie, ce que je veux bien croire. C’est une destination touristique prisée, mais pas aujourd’hui : le village était désert. Mais c’était peut-être mieux ainsi, cela renforce l’impression d’être hors du temps.

Après un encas consistant, mais long à venir, j’ai repris la route vers le nord, à travers le col de Troyan (троян). C’est une chouette route sinueuse à souhait qui culmine à 1631m d’altitude.

La plaine de Bulgarie depuis le col de Troyan

Bon quand il faut doubler un camion, et ils sont nombreux, c’est moins agréable. Comme je m’arrêtais de temps en temps pour prendre des photos, j’ai même doublé certains camions plusieurs fois. Ma Clio 4 1.2l est un peu poussive dans les montées, mais je suis en vacances : rien ne presse.

Ma voiture

Une construction imposante attend le l’automobiliste au sommet du col : l’arche de la liberté, 34 mètres de haut, érigée en 1980. Un côté du monument commémore la libération du pays du joug ottoman en 1878 et l’autre la libération de l’emprise nazie en 1944. On notera que dans les deux cas la Russie (ou l’Union Soviétique) est la libératrice.

L’arche se voit de loin, depuis la vallée en venant de Koprivchtitsa. Elle est agrémentée de statues colossales représentant les soldats de 1878 et de 1944 accueillis par des civils offrant le pain en guise de bienvenue.

Ensuite j’ai descendu le col pour arriver à mon étape du jour : Lovetch (Ловеч). J’y suis arrivé largement avant la nuit, mais j’ai quand même choisi cette photo pour illustrer la ville.

La forteresse Hisarya

Le soir, je me suis régalé d’un sach, un mélange légumes et de viandes (porc, poulet, veau) mijotés ensemble dans un pot en terre.

C’était très bon et très copieux. Ou alors c’était pour deux.

Demain matin je visiterai la vieille ville de Lovetch avant de prendre la route vers le  nord-est.

Il a fait encore beau et chaud, sauf au sommet du col, du fait de l’altitude.

La suite des photos dans l’album.

Troisième jour à Sofia

Aujourd’hui c’est dimanche et j’ai commencé ma journée avec la visite de la synagogue de Sofia.

La mosquée de Sofia

Elle a été inaugurée en 1909, en présence du Tsar Boris. Son architecture est de style neo-mauresque, avec des éléments d’inspiration viennois.

Elle est située juste à côté du marché, lequel est juste à côté de la mosquée, le tout est tout proche de Serdica à deux pas de la cathédrale Sainte-Nadejda. C’est dire si tout cela est concentré dans un petit périmètre.

Ensuite j’ai pris le tram 20 pour aller au Musée d’Histoire Militaire, un peu à l’écart du centre-ville.

C’est un grand établissement qui comporte deux parties. On voit d’abord une grande collection d’engins militaires : des canons, des avions et des blindés qui ont été utilisés par l’armée bulgare. Il y a un char français d’avant guerre (Hotchkiss H39) et quelques engins allemands, pour la période 1941-44, mais l’essentiel est d’origine soviétique. Pièce jamais vue (par moi) : une batterie complète de missiles anti-aériens S-75 Dvina (SA-2 pour l’OTAN).

Le musée d'histoire militaire

Ensuite un bâtiment de 4 étages raconte l’histoire militaire de la Bulgarie, illustrée par des tableaux, des uniformes, des armes et autres matériels.

Le musée d'histoire militaire

Le parcours est chronologique et débute par les Thraces et les Romains. Mais le gros vient avec l’insurrection contre les Ottomans (1876-1878) et les guerres balkaniques (1912-1913, très peu connues chez nous). Puis vient la 1ère guerre mondiale, pendant laquelle la Bulgarie était du côté de l’Allemagne. Les vitrines exposent quelques trophées d’origines françaises, car l’armée française est intervenue sur ce front sud, à l’aide de la Serbie, contre la Bulgarie. Allez voir ou revoir le film « Capitaine Conan ». Ensuite vient la seconde guerre mondiale, que la Bulgarie a commencé du côté de l’Axe, plus ou moins contrainte l’Allemagne en 1941, avant de changer de côté en septembre 1944, sous la forte pression soviétique.

Enfin la dernière salle passe rapidement sur l’après-guerre, avec la participation de la Bulgarie au Pacte de Varsovie puis à l’OTAN.

J’ai visité beaucoup de musées d’histoire militaire, presque dans chaque pays que j’ai visité. Celui-ci est un peu vieillot dans sa forme, mais il n’occulte ni ne renie aucune période, ce qui est plutôt rare, surtout dans les ex pays de l’est.

Ensuite je suis rentré à l’hôtel en passant par le monument à l’armée soviétique.

Le monument à l'armée soviétique

Chaque capitale libérée (ou conquise, question de point de vue) par l’Armée Rouge a le sien, et il est en général plutôt encombrant, à la fois physiquement et symboliquement. D’après ce que j’ai lu, celui de Sofia était souvent taggué ces dernières années, mais ce n’était pas le cas ce dimanche.

Enfin je suis rentré à l’hôtel pour me reposer et me préparer avant d’aller au mariage, qui est le prétexte officiel à ce voyage en Bulgarie (mais j’y serais venu de toute façon un jour ou l’autre)

Demain je quitterai la capitale pour faire un tour d’une semaine dans le pays, mais je n’en aurai pas fini avec Sofia puisque j’y retournerai pour mon dernier jour en Bulgarie.

Deuxième jour à Sofia

Les Serdi étaient un peuple thrace établi dans la région de l’actuelle Sofia. Quand les Romains ont conquis la région, ils ont appelé leur cité Serdica.
Serdica, c’est le nom de la station centrale du réseau de métro de Sofia dans laquelle des vestiges romains sont visibles.

La station de métro Sredica

Serdica devient Sraditza avec la domination grecque (byzantine en fait), puis Sredetz quand les Bulgares prendront le contrôle de la région en 809. Ce nom restera jusqu’au moyen-âge où, le nom de Sofia va apparaître puis s’imposer. Comme toujours dans le mode grec, la Sofia dont il est question ici désigne la sagesse, et non pas une personne. Ici il s’agit plus précisément de la principale église de l’époque, située à côté de la cathédrale Alexandre-Nevski.

En 2000 la ville a érigé cette personnalisation de Sainte-Sophie.

Sveta Sofia

Elle remplace avantageusement la statue de Lénine déboulonnée 10 ans plus tôt.

A deux pas se trouve la mosquée de Sofia.

La mosquée Bania Bachi

C’est le vestige le plus visible des siècles de domination ottomane.

La mosquée est juste en face du marché.

Le marché de Sofia

Il était quasiment vide quand j’y suis passé. Etonnant pour un samedi matin.

Et sur la même place se trouve le musée historique de Sofia. Il est assez petit et ne couvre pas toute l’histoire de la ville (mais plusieurs salles étaient fermées). La première salle est consacrée à la ville antique. Plusieurs objets de cette salle ont été restaurés grâce à des dons de Sylvie Vartan.

Sofia est devenue la capitale du pays, avec l’indépendance acquise en 1878. On passe donc directement à cette époque, avec notamment des souvenirs du palais royal, dont les trônes royaux.

Les trônes du palais royal (années 30)

Comme pour d’autres pays (re)créés au XIXème siècle (par exemple la Belgique ou la Grèce), la Bulgarie a été dotée d’un prince souverain (puis un roi) qui n’est pas originaire du pays puisqu’il est allemand. A savoir pour la Bulgarie Alexandre de Battenberg en 1879 puis Ferdinand de Saxe-Cobourg-Gotha.
Les dernières salles montrent des meubles, des objets, des costumes de la bourgeoisie sofiote aux alentours des années 1900.

Enfin je suis allé visiter la cathédrale Sainte-Nedelia.

Dans la cathédrale Sainte-Nedelia

Comme toutes les églises ici, elle est de plan carré et l’intérieur est entièrement couvert de fresques. Quand j’y suis passé, un baptême y était célébré. La cérémonie de rite orthodoxe est intéressante à observer.

Le soir je me suis régalé de délicieux travers de porc.

Le souci, c’est que j’avais commandé de l’agneau selon la recette de la grand-mère du chef, une recette parmi toutes celles proposées avec force détails par la carte. Même que j’avais eu du mal à choisir.

Après cela la nuit était tombée mais il faisait encore doux et je me suis promené dans l’avenue Vitosha, principale artère piétonne de Sofia, et dans le parc autour du palais national de la culture (NDK).

Le palais national de la culture (NDK)

Les deux sont très animés. La promenade digestive était très agréable.

Comme toujours, plus de photo dans l’album.

L’arrivée à Sofia

Après un vol sans histoire, mais en retard, je suis arrivé à mon hôtel à Sofia vers 15h. Je ne m’y suis pas attardé et suis aussitôt parti à la découverte de la ville.

Sofia est une petite ville mais très ancienne. Les Thraces s’étaient déjà installés dans le coin avant que les Macédoniens puis les Romains s’y intéressent. L’édifice le plus ancien de Sofia serait cette église romaine, probablement construite au IVème siècle.

La rotonde Saint-Georges

Elle est aujourd’hui encerclée de bâtiments administratifs de l’époque communiste, ce qui en fait un symbole assez représentatif de Sofia.

Tant qu’à être dans l’antique, je suis allé visiter le Musée National Archéologique. Il est plutôt modeste, mais propose d’intéressantes collections. Les objets présentés vont de la préhistoire à la période romaine, mais les plus intéressants sont ceux de la civilisation thrace, comme ce masque funéraire.

Masque funéraire

Les Thraces étaient un peuple antique qui occupaient à peu près le territoire de l’actuelle Bulgarie. Nous en reparlerons.

Pas très loin du musée se trouve la cathédrale Alexandre-Neski.

La cathédrale Alexandre-Nevski, Sofia

C’est probablement le monument le plus imposant et le plus connu de Sofia. Cette église commémorative a été édifiée au tout début du XXème siècle en reconnaissance du rôle crucial joué par l’armée russe dans la libération du pays de l’emprise ottomane, en 1878.
L’intérieur est couvert de fresques, mais hélas l’édifice est très sombre.

Je suis rentré tôt à l’hôtel et j’ai mangé dans un restaurant voisin.

La brochette était spectaculaire mais banale, et les frites pas cuites.
Il a fait très beau, et même chaud.

Comme d’habitude, vous trouverez d’autres photos dans l’album.

Demain, je continuerai de visiter Sofia, mais pour l’instant mon urgence est d’aller dormir, je me suis levé très tôt ce matin.

Malmö

Malmö est la troisième ville de Suède par la population, et c’est la dernière étape de mon voyage.
Ancienne ville industrielle, elle a su se reconvertir dans le tertiaire et le développement durable. Le symbole de la nouvelle Malmö est la tour Turning Torso.

Turning Torso

Avec ses 190 mètres, c’est la plus haute tour de Scandinavie. Son sommet est tourné de 90° par rapport à sa base. Spectaculaire. Terminée en 2005, elle abrite des bureaux, des logements et un centre de conférences. La tour a été conçue par l’architecte Santagio Calatrava, coutumier des formes non conventionnelles. Du même architecte, j’avais déjà vu le pont Samuel Becket à Dublin.

Mais Malmö est aussi une ville ancienne. Au Moyen-Âge elle était un relais important de la Ligue Hanséatique, dont l’influence est visible dans l’architecture des bâtiments les plus anciens, comme l’église St Pierre ou l’hôtel de ville.

L'hôtel de ville de Malmö

Je me suis promené toute la journée dans Malmö, notamment dans l’intéressant musée municipal. Un peu fourre-tout, il est à la fois musée d’histoire naturelle, d’art, d’histoire et des techniques.
En ce moment une de ses expositions temporaires est consacrée à la valise mexicaine. Elle contenait des milliers de négatifs de photos prises pendant la guerre d’Espagne par les photographes Robert Capa, Gerda Taro et Shim et avait été perdue en 1939. Elle a refait surface dans les années 2000 au Mexique, d’où le nom, au grand bonheur des historiens. L’exposition réalisée à partir de ces photos a été créée à New-York en 2010, avant de partir dans le monde entier. Je l’avais vue à Paris en 2013.

Mon vol de retour étant prévu à 19h de l’aéroport de Copenhague, je suis parti de Malmö vers 16h13. L’aéroport est desservi en 20 minutes par un train qui emprunte le pont-tunnel de l’Øresund.

Le pont-tunnel de l'Øresund

Le trajet commence par un pont puis plonge dans un tunnel via une île artificielle. Cette liaison à la fois routière et ferroviaire a été inaugurée en 2000 et a grandement dynamisé la région, mettant Malmö dans la banlieue de Copenhague. A moins que ce ne soit l’inverse.

Cette dernière journée était elle aussi très ensoleillée, et même très chaude, en dépassant allègrement les 30°C. D’après les autochtones, on est très largement au dessus des moyennes habituelles, tant pour l’ensoleillement que pour les températures.
J’ai donc eu beaucoup de chance, car au delà de la météo très favorable, le voyage s’est très bien passé.
Je suis très content de cette escapade en Scandinavie, je reviendrai !