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Le château de Bragance

Bragance est la principale ville de l’extrême nord est du Portugal. Ce qui m’a attiré ici est son splendide château.

Le château de Bragance

C’est une petite ville entièrement ceinte de murailles et d’une surface de trois hectares. Elle possède une dizaine de tours et trois portes, dont deux sont juste assez larges pour laisser passer les voitures. La ville est toujours habitée.

Sur un côté de l’enceinte se trouve le château proprement dit.

Le château de Bragance

Son imposant donjon carré écrase de sa masse le château, mais les quatre tours massives qui font partie de l’enceinte du château ne sont pas moins impressionnantes.

Le château et ses deux enceintes forment un remarquable ensemble cohérent qui semble comme neuf. L’état actuel du château est celui du début du 16ème siècle. Mais le château a subit d’importants dommages pendant la Guerre de Restauration (1640-1688) et la Guerre Fantastique (1762-1763, une branche de la Guerre de Sept Ans).
Le château a été classé monument historique en 1910 et a été restauré à partir de cette date.
Le donjon un petit musée militaire.

Un autre monument attire l’attention, à côté de l’église : la domus municipalis.

Domus Municipalis de Bragança

Ce bâtiment pentagonal aux faux air de bastion date probablement du début du 13ème siècle. Il s’agit d’une citerne, dans la partie basse, à laquelle a été ajoutée un salle percée de dizaines de petites fenêtres. Elle servait de lieu de réunion pour ce qu’on appellerait aujourd’hui le conseil municipal. Le nom « domus municipalis » est toutefois une invention du 19ème siècle. Dans les documents anciens, on parle de Sala da Água (la salle d’eau).

La ville de Bragance offre peut d’intérêt à part son château qui lui mérite le détour. C’était aussi une étape commode sur mon périple qui entrera demain en Espagne.

Cette étape a aussi confirmé mes lacunes dans l’histoire du Portugal. Autant la Guerre de Restauration, j’imagine de quoi il s’agit, mais La Guerre Fantastique ? Jamais entendu parler.

Le vin de Porto

Le nom de Porto est indissociable du vin de Porto. Ce vin est très apprécié en Angleterre, et on peut dire qu’il a été façonné par et pour les Anglais.

Le rôle des marchands anglais est en effet crucial dans l’histoire du vin de Porto (et de Bordeaux aussi d’ailleurs, mais c’est une autre histoire). Tout commence avec Colbert, ministre de Louis XIV, qui interdit le commerce avec le royaume de Grande Bretagne. En rétorsion, celui-ci interdit, déjà, l’importation de vins français. Or les Anglais étaient amateurs de vins et, n’en produisant pas eux mêmes, ils en ont cherché ailleurs. Il y avait déjà des négociants anglais dans le nord du Portugal, mais le vin qui y était produit alors ne convenait pas aux palais anglais. Ils ont donc fait évoluer les terroirs, les cépages et les méthodes de vinification, pour en faire le Porto (ou Port) puis l’exporter avec grand succès en Angleterre et dans le monde.
Les vignes sont cultivées dans les montagnes de l’arrière pays, sur les rives du Douro. Puis le vin est apporté à Gaia, la ville qui fait face à Porto de l’autre côté du fleuve, où il sera vieilli en fût ou en bouteille. Autrefois le vin était transporté par bateaux, dont de nombreuses reproductions sont amarrées les long des quais, ça fait partie du décor.
Le climat de la montagne est idéal pour la vigne. Le vin qui y est produit est appelé Vinho verde et ne deviendra Porto qu’après son passage à Gaia où les climat est idéal pour le vieillissement.

On ne m’empêchera pas penser que le nom « Porto » pour le vin est donc une double imposture : on devrait dire vin du Douro ou de Gaia. C’est peut-être pour cela que les Anglais disent « Port » finalement.

La grande majorité des maisons de Porto sont d’origine anglaise : Offley, Churchill, Graham, Croft, Taylor, … et toutes sont installées le long du Douro à Gaia.
J’ai visité les caves de Taylor, réputées les plus spectaculaires dans les guides.

Les chais de la maison de Porto Taylor

La maison Taylor a été fondée en 1692 (en plein règne de Louis XIV, comme par hasard), et c’est une des plus anciennes et des plus prestigieuses. Je suppose qu’elles disent toutes un peu la même chose mais Taylor est fournisseur officiel de la Reine d’Angleterre, tout de même.
La visite est individuelle, avec un audioguide, et traverse une partie des chais de vieillissement et où flotte une odeur qui n’est pas désagréable. C’est le résultat de l’évaporation des éléments les plus volatiles pendant le vieillissement, ou la part des anges. On y apprend l’histoire de la compagnie, les procédés de fabrication et les différentes sortes de vins de Porto. La visite se termine par la boutique et une dégustation des deux sortes de Porto : un blanc sec (2 à 5 ans d’âge) et un LBV, pour Late Bottled Vintage (rouge, 4 à 6 ans d’âge).
C’est très parfumé, mais à boire à petites doses. Le blanc sec est conseillé avant le repas et le LBV après.
Au passage on peut en déguster d’autres, beaucoup plus vieux et beaucoup plus chers, jusqu’à 46€ le verre, mais il ne faut pas abuser.

Après avoir visité les caves le samedi, j’ai pris la voiture le dimanche et, chemin faisant vers l’est du pays, j’ai traversé une partie des vignobles.

Vignoble du haut Douro

La région autour de Pinhão, appelée Cima Corgo, est le coeur de la région viticole. Les raisins cultivés ici sont considérés les meilleurs et sont utilisés par les plus grandes maisons, dont Taylor.

Le Douro à Pinhão

Les routes y sont sinueuses à souhait, avec de temps en temps un point de vue sur le fleuve. Je n’était pas le seul à profiter du moindre espace de stationnement au bord de la route pour jouir du paysage. Il y avait de nombreuses voitures immatriculées en France : j’ai croisé des 21, 31, 56, 82, 69, 91 ou 94. Ça fait quand même une sacrée distance pour eux !

J’ai vu aussi plusieurs bateaux, dont trois de croisière fluviale, mais de trop loin pour en identifier la compagnie.

Je suis très satisfait de cette découverte oenologique en deux temps : les caves hier et le vignoble aujourd’hui. Ce parcours m’a fait faire un détour sur la route de Guimarães à Bragance, mais sous ce beau soleil ça valait le coup.

Guimarães

« Aqui nasceu Portugal » est écrit comme un slogan sur un mur de Guimarães.

Ici est né le Portugal

« Ici est né le Portugal », voilà qui mérite approfondissement.

Guimarães est une petite ville à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Porto. Elle occupe une place toute particulière dans l’histoire du Portugal.
Le personnage principal de cette histoire serait né à Guimarães le 25 juillet 1109 : il s’agit de Alfonso Henriques (Alphonse, fils de Henri). Henri de Bourgogne, le père d’Alphonse, était le comte de Guimarães. Alphonse hérite du titre à la mort de son père, mais il n’a que trois ans, et sa mère, Thérèse de León assure la régence.
Plus tard cette dernière se rapproche de la noblesse de la Galice et cherche à faire entrer Guimarães dans le giron galicien. Cela déplaît à la noblesse portugaise qui pousse Henri à s’opposer à sa mère. Les deux camps d’affrontent à la bataille de São Mamede, près de Guimarães, en 1128. Le camp d’Henri (les Portugais) bat celui de sa mère (les Espagnols, je simplifie). Le prestige d’Henri grandit.
Tout cela se déroule à une époque où les Maures disputent toujours le pays aux chrétiens. Le 25 juillet 1139, jour de son anniversaire et jour de la Saint-Jacques1, Henri gagne une bataille contre les Maures à Ourique, dans le sud du Portugal. A l’issue de celle-ci, Henri est proclamé (ou s’auto-proclame, les textes divergent) Roi du Portugal. Cela est reconnu par le Roi de Castille Alphonse VII, sous la pression du Pape, par le traité de Zamora en 1143.
Le Portugal est né et Guimarães en devient sa première capitale.

Aujourd’hui Guimarães est une petite ville dotée d’un centre historique très sympathique. Les principaux monuments de Guimarães sont le château et le palais des ducs de Bragance.

Le château de Guimarães impose sa silhouette sur une petite hauteur à l’écart de la ville.

Le château de  Guimarães

On est frappé par ses tours carrées et ses créneaux d’inspiration mauresque. Les premières traces du château datent du 11ème siècle mais l’aspect actuel est du 14ème. Sa cour intérieure est très petite, le donjon en occupe presque tout l’espace. Il abrite dans ses salles un petit musée narrant l’histoire du château et de la naissance du Portugal, rapidement résumée ci-dessus.
Même tout petit, le château de Guimarães est spectaculaire et il est très fréquenté par les locaux en ce dimanche ensoleillé.

Le palais des ducs de Bragance est tout près du château, sur le chemin de la ville.

Le palais des ducs de Bragance à Guimarães

Il a été construit dans les années 1420 par Alfonso, fils illégitime du Roi du Portugal Jean 1er, et futur Duc de Bragance. Ce titre sera porté par la suite par les héritiers à la couronne, comme le Prince de Galles au Royaume-Uni ou le Dauphin de France (qui a en apanage le Dauphiné.)
En 1933 le palais est en ruine et Salazar, alors président du Conseil des ministres du Portugal2, le fait restaurer. Il deviendra résidence du président, puis sera ouvert au public comme musée en 1959.
Les parties visibles comprennent la chapelle, des salles de résidence et d’apparat. J’ai été frappé par le volume et la charpente de ces dernières.

Le palais des ducs de Bragance à Guimarães

Les visites du château et du palais de Guimarães se complètent et illustrent chacun à sa manière l’histoire du Portugal.
C’était une étape idéale après la matinée passée à Porto.

Comme d’habitude : plus de photos ici ou .

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1. Saint-Jacques est le saint patron de la lutte contre les Maures et surnommé « Matamore », c’est à dire « tueur de Maures ».go back
2. Lire: dictateurgo back

Retour à Porto

Vous vous souvenez peut-être que je suis déjà venu à Porto pour un long week-end, c’était il y a presque deux ans.
La ville n’a pas tellement changé depuis, et il n’y a pas non plus de grand événement qui aurait pu motiver ce retour.
Mais cette ville et son aéroport forment un point d’entrée idéal pour un itinéraire touristique dans le nord du Portugal et le nord-ouest de l’Espagne Galice.
En outre, ma dernière visite avait été un peu perturbée par la Red Bull Air Race et je n’avais pas pu visiter tout ce que j’avais initialement prévu. C’est pourquoi j’ai passé une nouvelle journée à Porto, pour rattraper cela, et en faire un peu plus.

Porto

La première chose que je voulais voir est le Centre Portugais de Photographie.

Le Centre Portugais de Photographie

Cette imposante bâtisse était à la fois une prison est une cour de justice, édifiée en 1767. Elle est restée une prison jusqu’à la Révolution des Oeillets et la chute de la dictature, en 1974.
Le bâtiment en lui seul est étonnant. Construit sur une parcelle triangulaire, son architecture est un entrelacs d’escaliers, de cours intérieures et de gigantesques salles.

Dans la cour intérieur du Centre Portugais de  Photographie

La structure en bois abrite un autel pour dire la messe aux détenus. Quelques salles sont consacrées à l’histoire carcérale des lieux.

Mais le lieu est aujourd’hui dédié à la photographie avec une importante collection d’appareils photos, une bibliothèque et des salles d’expositions.

Expositon au Centre Portugais de Photographie

La principale exposition du moment est « Tell the world about us » (« Dites au monde que nous existons »). Le photographe Rune Eraker a parcouru le monde pendant quatre ans à la rencontre de personnes victimes de violence, d’arbitraire ou de préjugés. Poignant.

L’autre site dont j’avais été frustré il y a deux ans est le monastère de Serra do Pilar.

Le monastère de Serra do Pilar

Situé sur une hauteur qui surplombe le pont pont Luís I., sur la rive sud, on le voit de toute la ville. Des moines de l’ordre de St Augustin se sont installés ici en 1538. C’est ici aussi que le général Arthur Wellesley, futur duc de Wellington, a organisé ses troupes pour reprendre la ville aux troupes napoléoniennes en 1809. Le site appartient depuis 1947 à l’armée, l’artillerie pour être précis, qui autorise les touristes à visiter l’église et le cloître.

Le cloître du monastère de Serra do Pilar

Tous deux sont circulaires et ont le même diamètre de 29m. Des églises rondes, il y en a plusieurs, à commencer par le Panthéon à Rome ou la Salute à Venise. Mais un cloître rond, c’est unique d’après la guide. Je veux bien la croire. En tout cas je n’en ai encore jamais vu.

L’église est ronde, donc, et elle possède des chapelles rayonnantes à la place des chapelles latérales. Les autels et toutes les statues de saints sont en bois, parfois doré, sauf celle de St Augustin,  en pierre et baigné d’un rayon de soleil au moment de ma visite.

L'église du monastère de Serra do Pilar

Je suis bien content d’avoir profité de ce retour dans la région pour visiter ces deux monuments.

Avant de quitter Porto, je me suis intéressé au vin de Porto, que les Anglais appellent « port ».

Petite parenthèse, en parlant d’Anglais. Je ne sais pas bien pourquoi ils disent « port » pour le Porto, le vin, mais plus curieux encore, ils disent « Oporto » pour Porto, la ville. Ce serait dû apparemment à une mauvaise traduction de la locution portugaise « o porto », qui signifie bien sûr « le port ». Fin de la parenthèse.

La rive sud de Porto est le domaine du vin de Porto. Techniquement, il s’agit en fait d’une autre ville : Gaia.

Gaia


C’est là que sont basées toutes les maison de vins de Porto, mais j’en parle plus en détail dans un autre article.

Je ne suis resté  24 heures à Porto (vendredi après-midi et samedi matin), mais j’ai quand même profité de la ville et de ses rues en pente.

En plus il faisait beau, sauf un petit intermède pluvieux samedi  matin, et nettement moins caniculaire que ces derniers jours en France.

Comme d’habitude : plus de photos ici ou .