Archives de catégorie : Lille 2015

Lille 3000 – Renaissance

Lille a été capitale européenne de la culture en 2004. Il faut croire que l’expérience a été concluante puisque depuis, tous les 2 ou 3 ans, la ville organise une grande saison culturelle, sous le nom de Lille 3000.

Je n’ai pas participé à toutes les éditions, mais je sais qu’il y a des tas de choses à voir et que ça peut justifier le déplacement pour un week-end. Surtout si, par chance, un concert exceptionnel tombe justement pendant ce week-end.

L’édition 2015 s’appelle « Renaissance » et s’articule autour de 5 villes qui, chacune à sa manière, a connu une forme de renaissance : Rio, Detroit, Eindhoven, Phnom Penh et Seoul.  A chaque ville est associé un thème et une exposition d’artistes du pays.

Pendant 4 mois, des tas d’expositions, spectacles, ateliers sont proposés à travers toute la ville, et au delà.

Le Tripostal
Le Tripostal

Le lieu d’exposition le plus important est le Tripostal, pour Séoul. Ici donc des tas de créations coréennes, dont les fascinantes mécaniques de Choe U-Ram. En parallèle et sur 3 niveaux, il y a aussi des tas d’autres choses, dans le cadre de l’expo « Tu dois changer ta vie ». Comme toujours en matière de création contemporaine, c’est parfois abscons, mais aussi souvent spectaculaire et ludique, comme cette pièce entièrement remplie de ballons de baudruche sur 3 mètres de hauteur et qu’on pouvait traverser.

JR sur la Grand Place
JR sur la Grand Place

En dehors des grandes expositions, des oeuvres sont installées sur la voie publique, comme par exemple cette photo de JR placardée sur la façade de la Voix du Nord.

Breathing Flower (Choi Jeong Hwa) à l'Hospice Comtesse
Breathing Flower (Choi Jeong Hwa) à l’Hospice Comtesse

L’Hospice Comtesse est un musée d’histoire locale, et accueille Phnom Penh pendant Renaissance. Donc des créations d’artistes cambodgiens, logiquement très marqués par le génocide des Khmers rouges. La fleur gonflable dans la cour est plus gaie.

Mécaniques Discursives (Fed Penelle & Yannick Jacquet) à la Maison Folie Moulins
Mécaniques Discursives (Fed Penelle & Yannick Jacquet) à la Maison Folie Moulins

La Maison Folie Moulins est un centre culturel (j’ai l’impression qu’il y en a plein dans la métropole lilloise) installé dans une ancienne brasserie (je suppose qu’il y en a plusieurs aussi) et c’est ici qu’on trouve Eindhoven. L’aspect mis en avant ici est le renouveau de la ville d’Eindhoven, après la crise Philips, par la création et l’innovation. C’est sans doute pour cela que la Maison est en grande partie consacrée aux « Makers », les gens qui fabriquent quelque chose. C’est la version 2015 du bricolage ou des loisirs créatifs, mais avec imprimante 3D et découpe laser.

Babel (Greg Fadell) à la Gare Saint Sauveur
Babel (Greg Fadell) à la Gare Saint Sauveur

Si le Tripostal est un ancien centre de tri postal, la Gare Saint Sauveur est une ancienne gare de marchandise, friche industrielle toute indiquée pour recevoir Detroit. Ici, sans surprise les créations tournent autour du destin d’une ville industrielle martyrisée par la crise. En contrepoint, c’est aussi le lieu choisi pour présenter le jardinage urbain. Mais attention : pas de jolies fleurs ici, que des légumes : pommes de terre, artichauts, salades. Pas de quoi nourrir une famille dans le besoin, mais si ça peut ré-apprendre certains choses oubliées aux citadins, c’est déjà pas mal.

Rio était certainement très intéressant aussi, mais je n’ai pas eu le temps d’aller voir. Ça passe vite un week-end.

Textifood au Musée d'Histoire Naturelle
Textifood au Musée d’Histoire Naturelle

En marge de Renaissance, d’autres institutions culturelles proposent des expositions temporaires, comme par exemple le Musée d’Histoire Naturelle. Le musée est tout à fait classique, vieillot à souhait, mais j’aime bien cette ambiance particulière, surtout avec les petits enfants qui galopent d’un squelette de baleine à une litanies d’oiseaux naturalisés.

Mais le plus intéressant en ce moment est l’exposition Textifood qui présente des nouvelles fibres textiles extraites, parfois très récemment, à partir de tout un tas d’animaux et de végétaux y compris alimentaire : ananas, banane, noix de coco, ortie, café, riz, soja, maïs, betterave, lin, lotus, algues, champignons, vins, bières, coquillages et crustacés… On n’est pas si loin de Renaissance, puisque l’industrie textile, à base de coton, laine ou lin, a été importante dans la région.

Et pour faire bonne mesure, on a fait appel à des créateurs pour mettre en oeuvre tout ça. L’expo a été présentée à Milan en parallèle de l’expo universelle, mais après mon passage.

Donc je résume : des tas de belles choses à voir, à écouter et à manger et en plus il a fait très beau. C’est ce que j’appelle un beau week-end !

Kraftwerk 3D

Tout le monde vous le dira, à commencer par wikipedia : Kraftwerk est un groupe de musique électronique fondé en 1970 à Düsseldorf. C’est même un pionnier de la musique électronique et 45 ans après il joue encore. De cette époque ne reste qu’un seul des membres fondateurs : Ralf Hütter (à gauche sur les photo ci-dessous), qui a aujourd’hui 69 ans. Les autres membres du groupe sont des jeunots de 60 ans et sont arrivés plus tard.

Je ne me souviens pas avec certitude de quand j’ai entendu la musique de Kraftwerk pour la première fois, mais je pense que j’en avais emprunté des CD à la médiathèque de Metz, sûrement quand j’étais au lycée. Et pour être honnête je ne savais pas que le groupe était encore en activité quand Alejandro m’a annoncé leur venue en France pour une petite série de concerts. Petit détail : la représentation la plus proche était prévue à Lille. Les billets sont partis très vite mais, chance, une deuxième séance a été ajoutée et on a pu attraper des billets parmi les derniers disponibles. C’était en avril.

C’est que les prestations en public de Kraftwerk sont rares. Même si, j’ose à peine le dire,  le groupe est venu pour 8 dates il y a pile un an à la Fondation Vuitton, mais ça m’avait complètement échappé à l’époque.

Passons.

Le concert a commencé à 23h (la fameuse seconde séance) et a duré deux heures. La lieu était le Nouveau Siècle, la salle de l’orchestre Philharmonique de Lille à l’acoustique réputée et aux sièges confortables, pas vraiment le lieu typique pour un concert de musique électronique.

Première surprise, avant même de pénétrer dans la salle de concert : on nous remet des lunettes 3D. En effet la musique sera accompagnée d’animations en 3D projetées sur grand écran derrière les musiciens. Ce qui n’est plus mal car ces derniers sont statiques, debout derrière leurs pupitres.

Autre constat : le public a largement plus de 40 ans de moyenne. Un peu comme au concert de Mark Knopfler en juin dernier, quand j’y repense. Heureusement mes voisins de fauteuil faisaient baisser la moyenne d’âge 😉

Computerworld (1981)
Computerworld (1981)

On commence avec Computerworld. Les premières animations 3D font danser des chiffres, au grand ravissement du public. Ce qui m’a inquiété un peu : si certains réagissent bruyamment pour si peu de choses et dès le début du spectacle, ça va mal finir. Mais les choses se sont calmé une fois le premier morceau passé.

Autobahn (1974)
Autobahn (1974)

Autobahn est un des morceaux les plus connus du répertoire de Kraftwerk. La musique est illustrée par des images de Volkswagen ou de Mercedes circulants sur les fameuses autoroutes allemandes. La voiture n’est pas floue : elle est en 3D mais l’appareil photo ne le sait pas.

Die Roboter (1978)
Die Roboter (1978)

Vers la fin du concert, les musiciens ont laissé la place à des robots pour le morceau Die Roboter. J’ai bien regardé : ce ne sont pas les robots qui jouaient. En revoyant la photo, ces robots me font surtout penser à des Playmobil.

Entre temps d’autres morceaux emblématiques ont été joués, comme Radioaktivität, créé en 1975 mais mis à jour pour évoquer Tchernobyl et Fukushima, ou Tour de France, de 1983. Ralf Hütter est fan de vélo.

C’était donc deux heures intenses, avec, peut-être, vers la fin, un petit passage à vide dû à l’heure tardive. Deux heures d’images et, surtout de bonne musique. Bon il peut y avoir des passages longuets ou rébarbatifs, mais dans l’ensemble la musique est agréable à l’écoute et beaucoup de morceaux ont traversé les décennies sans difficultés.

Il y a aussi un aspect un peu paradoxal : voilà de la musique moderne jouée par des papis, de la musique électronique sans ordinateurs et accompagnée d’images de synthèse rudimentaires.

C’est peut-être tout ça qui ont fait de ce concert une expérience unique, et c’était un vrai plaisir de les entendre en vrai pour la première fois, si longtemps après les CD.