Les castros de Galice

Il y a des tas de raisons de venir en Galice : Saint-Jacques-de-Compostelle, la mer, les hóreos , le poulpe. Mais pour moi il y en avait une autre : les castros.
Un castro (du latin castrum : château) est un village fortifié en pierre. En français, on pourrait parler d’oppidum. Le terme anglais est hill fort (hill : colline), même si le village est en plaine.
Les archéologues utilisent le terme « culture des castros » pour désigner la culture du nord-ouest de la péninsule ibérique, pendant une période qui va de la fin de l’âge du bronze (9ème siècle avant JC) à l’arrivé des Romains, au 1er siècle après.
Les populations concernées étaient des celtibères, cousins des celtes d’Europe centrale.

Plus de 2000 castros ont été localisés, essentiellement en Galice, mais aussi dans les régions voisines en Espagne et au Portugal.

Castro de Santa Trega
Castro de Santa Trega

J’ai visité 4 castros parmi les plus importants de Galice : Viladonga (au nord de Lugo), Borneiro (près de la Costa da morte), Baroña (sur la ria de Muros et Noia) et Santa Trega (entre l’océan et le fleuve Minho).

Le castro, c’est d’abord une enceinte. Elle peut être un mur en pierre ou un talus en terre, comme à Viladonga. Cette dernière est de plus doublée de plusieurs fossés concentriques. Vue de la plaine, l’enceinte de Viladonga fait penser à un cratère.
A Borneiro, l’enceinte est un mur de plusieurs mètres d’épaisseurs doté d’une porte.

L'entrée du castro de Borneiro
L'entrée du castro de Borneiro

Le castro de Baroña est au bord de la mer. Il se dresse sur une petite péninsule rocheuse dont l’isthme est barré d’un solide mur. Un second mur, doublé d’un fossé, a été érigé une trentaine de mètres en avant. Il est sans doute postérieur au mur principal.

Castro de Baroña
Castro de Baroña

A la différence des hill forts d’Irande, un castro n’est pas une enceinte vide. Elle est remplie de maisons.

Vu de haut on à l’impression de lire un plan (et encore, je n’ai pas de drone), car il ne reste des maisons que les murs qui dépassent du sol de quelques dizaines de centimètres.
Les maisons sont quasiment toutes rondes, d’environ 4 ou 5 mètres de diamètre, avec une seule pièce et une porte.
Les sites que l’on visite aujourd’hui ont été ensevelis au cours des siècles. Ils ont été fouillés, beaucoup dans les années 1970 et 80 et un petit nombre de maisons ont été dégagées. On devine qu’il en reste encore à découvrir.

A Viladonga, une maison se distingue : elle est rectangulaire et beaucoup plus grande que ses voisines.

Castro de Vidalonga
Castro de Vidalonga

Les archéologues pensent qu’il s’agit d’un espace commun, grenier ou salle de réunion, qui date de la période romaine pendant laquelle le castro était encore occupé.
Par ailleurs, ce castro est moins dense que les autres, on y devine même une rue principale. Peut-être est-ce là une influence de l’urbanisme à la romaine.

A Santa Trega, la reconstitution d’une maison permet de se faire une idée de son aspect quand le castro était habité.

Reconstitution d'une maison d'un castro
Reconstitution d'une maison d'un castro

La maison typique de castro devait donc être couverte d’un toit de chaume. A l’intérieur, une seule pièce, mais possiblement avec un couchage aménagé sur un plancher en bois en hauteur, façon mezzanine.

En général, il y a très peu d’espace entre les maisons, cela se voit bien à Santa Trega.

Castro de Santa Trega
Castro de Santa Trega

Aucune rue n’est tracée, on ne devine pas d’enclos pour du bétail. En fait, les castros ne paraissent pas très fonctionnels. Des fouilles ont bien trouvé des objets de la vie quotidienne (outils en bronze, poteries, bijoux en or), mais pas de puits. Autre énigme pour les archéologues, aucune sépulture n’a été localisée.
Il est possible que les familles vivaient disséminées dans la campagne et ne se réfugiaeant dans le castro qu’en temps de crise.

Il y a beaucoup d’autres castros en Galice. Il faut croire qu’on ne peut pas creuser sans tomber sur un castro.
Beaucoup n’ont que quelques maisons mais d’autres sont sont de véritables villes, comme le castro de San Cibrán de Lás, près d’Orense dans le centre de la Galice, ou la Citânia Santa Luzia, près de Viana do Castelo dans le nord du Portugal, mais ces sites n’étaient pas très compatibles avec mon circuit.
On ne peut pas tout voir en si peu de temps.

Il est heureux que le premier castro que j’ai visité fut celui de Viladonga, car il est accompagné d’un joli et instructif musée. Les autres ne proposaient au mieux qu’un panneau informatif.
La section « archéologie » du Musée de la Mer de Galice à Vigo a quelques panneaux sur la culture des castros, mais ils n’étaient pas traduits.
D’ailleurs, un petit castro a été mis au jour entre deux des bâtiments du musée.

Sur les quatre principaux castros visités, j’ai plus particulièrement aimé ceux de Baroña et de Santa Trega.

Castro de Baroña
Castro de Baroña

Baroña est isolé sur sa petite péninsule au bord la mer, et les maisons sont au milieu des rochers. Depuis le parking, il faut marcher quelques hectomètres à travers une forêt d’eucalyptus avant d’approcher le castro. La balade est très agréable.
Santa Trega est beaucoup plus important, et encore seule une partie a été dégagée, on ne sait même pas la superficie totale du village. Le castro est sur une montagne de 340m de haut très fréquentée par les touristes locaux (il y a un ermitage au sommet). Elle domine l’océan et l’embouchure du fleuve Minho qui fait la frontière avec le Portugal. Les vues sont splendides.

Le fleuve Minho
Le fleuve Minho

Je suis très content d’avoir visité ces quelques castros. J’en sais maintenant un peu plus sur eux, mais il reste un mystère.
Pourquoi ce type d’habitat ne semble exister que dans cette région du monde ? Pourquoi il n’y a pas de traces similaires ailleurs, aussi nombreuses, concentrées dans l’espace mais pendant autant de siècles et avec autant de constance dans le plan et l’organisation ?
Je n’ai pas trouvé la réponse, et peut-être qu’il n’y en a pas.
Pour X raisons, le castro a été inventé en Galice, mais qu’ailleurs l’habitat était principalement en matériaux périssables. Une maison de l’âge du fer en bois et torchis, par exemple, ne laisse comme vestiges que des trous de poteaux, moins visibles et pérennes que des fondation en pierre.

La question reste posée. Je n’ai pas eu le courage de me plonger dans les articles universitaires (plusieurs centaines de pages au total) que j’ai trouvés sur internet. Un jour peut-être.

Histoire de ne pas rester sur sa faim, voici le plat que j’ai dégusté le soir à Tui.

Secreto de Cerdo

Le secret de porc est une pièce située près de l’épaule, difficile à prélever et « généreusement infiltré du gras typique des porcs ibériques » dixit un site spécialisé. Accompagné d’une petite purée de piment, et malgré les frites pas terribles typiques des restaurants espagnols dixit mon expérience, c’était très très bon.

Comme d’habitude : plus de photos ici ou .

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